Adm (451 articles pour l'instant) | | Interpellation d'une Africaine de 21 ans à Paris
Pour être franche, j'étais déjà assez blasée par la race humaine. J'avais déjà remarqué comment les âmes toutes autant qu'elles sont, s'égaraient de la voie de l'humanité, de la voie du cœur...
J'avais déjà remarqué que la terre devenait le cirque d'un grand n'importe quoi, entre ceux qui pensent que cette planète est leur fait et qu'ils arriveront à la dominer entièrement, qu'ils arriveront à la recréer entièrement, qu'ils arriveront à aller au delà de l'univers et contrôler le cycle de la vie, entre ceux qui transforment la parole sainte au gré de leurs envies et uniquement quand cela les arrangent.
Enfin bon, voilà.
Plus jeune, je m'en offusquais, je trouvais cela complètement aberrant que les gens ne se rendent pas compte de leur bêtise, de leur égoïsme.
Et surtout je trouvais triste d'être là, d'observer, d'être passive...
Mais la condition noire m'est apparue il y'a peut être 6 mois.
Avant, j'acceptais naïvement de me sentir inférieure à certains simplement parce que je n'avais pas le même confort, je n'avais pas les mêmes avantages, je n'avais pas le même train de vie.
Et inconsciemment, parce que j'étais noire.
Pourtant je n'étais pas matérialiste du tout, pourtant je ne me considérais pas comme mouton de panurge qui se contentait de suivre les codes dictés par la société.
J'ai réalisé la peine des noirs, celles qui sont enfouies au plus profond d'eux, cette plaie tellement profonde qui après des siècles et des siècles ne cicatrise toujours.
J'ai réalisé le sacrifice que de pauvres gens font de leur vie : ils laissent familles et amis, joie et bonheur même dans la misère pour venir errer dans les rues occidentales, pour ne plus s'autoriser qu'un semblant de vie "débauche, sorties arrosées, boites de nuit à gogo, fêtes ici et là...", pour ne plus se sentir vivre que pendant qu'ils portent le dernier sac Versace ou bien le dernier parfum de je ne sais qui.
Des gens qui ne se sentent pas exister s'ils n'ont pas les feux des projecteurs braqués sur eux, et qui ont vite oublié les valeurs familiales tellement ils n'ont plus le temps d'y penser.
Des gens qui courent après le temps des heures durant même en sachant que jamais ils ne le rattraperont, des personnes emprisonnées dans une vie qu'il n'aurait pas choisi s'ils avaient su avant faire LE choix ...
J'ai constaté combien l'homme noir pleure en silence à chaudes larmes, et les jets ne se font que de plus en plus puissants. Il est submergé par ses larmes, totalement noyée dans sa propre douleur qu'il ne sait plus voir ou entendre.
Il se contente simplement de nager pour ne pas non plus couler.
J'ai remarqué le peu d'estime qu'il a pour lui même, ce non respect de sa personne issu du fait qu'il est involontairement convaincu qu'il n'est bon à rien d'autre.
J'ai compris les frustrations de ceux qui sont restés là bas, au pays de la misère comme certains disent si bien..., du fait qu'on ne leur accorde aucun crédit.
S'entendre parler sans être écouté est quelque chose de tellement usant que parfois les âmes tombent les armes et finissent pas se haïr elles-mêmes.
Ce noir là qui est en colère contre la discrimination, ce noir là qui pleure sans cesse et implore la reconnaissance de ceux qui ont détruit ce qu'il était au plus profond de lui même sans le faire sciemment.
Dans mon esprit, le noir ne sait plus qui il est, et l'africain encore moins.
Il se cherche une identité, une réalité, un point commun à véhiculer, quelque chose qui fédèrerait ce qu'ils sont.
Mais ils n'ont pas de chance car le monde ne leur renvoie l'image que de leur laideur.
Dans le même temps, on ne peut pas nier son tort de toujours vouloir que ce soit les autres qui trouvent des solutions à ses propres équations, de vouloir croiser les bras et attendre un leader tel CHE GUEVARRA, M.L.KING, MalcomX ou je ne sais qui d'autres.
Ils veulent aussi entendre parler d'héroïsme... enfin bref, on ne peut pas leur en vouloir.
Mais personne ne veut endosser le brassard du possible échec car nos chers et tendres ancêtres ne nous ont pas appris, à nous francophones en particulier à aimer les nôtres.
Ils nous ont surtout appris à vénérer l'autre plus que les siens.
Africaine de mon état, je ne peux que sourire quand j'entends certains discours de mes propres parents, quand je vois à quel point ils accentuent le phénomène du rejet de soi.
Nos aînés ne savent rien apprendre d'autre à leur enfant que de pleurer, pleurer sur leur sort et toujours, trouver mieux ailleurs que chez eux.
J'en parlais avec un oncle et des tantes dernièrement, et je n'ai pu m'empêcher de leur dire qu'il fallait qu'ils arrêtent de pleurer, de tout ramener au passé, de nous insuffler leurs frustrations passées, de nous emprisonner dans ce qu'ils ont vécu...
Qu'ils nous laissent avancer.
L'esclavage est un point dont je me suis défaite.
Pourquoi revenir là dessus? Ce qui s'est passé s'est passé, d'autant plus que l'esclavage, est la douleur des noirs américain, pas des noirs Africains.
Alors pourquoi dont les gens y reviennent sans cesses?
Le noir américain n'a rien du noir africain, tout comme le noir antillais n'a rien du noir hispanique.
Nous avons peut être la même couleur, mais finalement nous ne sommes pas un noyau.
Il faut que les gens se défassent de cela, Obama a mené un combat, nous sommes tous impressionnés, mais il est américain avant tout et laissons lui ce droit, cela ne m'étonnerait pas d'entendre "aahhh il a rien fait pour l'Afrique" dans quelques années.
Tous les blancs de la terre ne s’identifient pas entre eux, alors pourquoi sommes-nous aussi attachés à cela?
On ne peut pas tout mener de front, on mène un combat Africain, ou Américain, ou Antillais ou Hispaniques.
Je ne comprends ce fait chez nous, pas qu'il faille une division, mais plutôt une acceptation des faits, nous sommes africains alors battons nous pour l'Afrique : du moins pour ceux qui se sentent concernés.
Moi je regarde en avant et je m'assurerai que ce crime humanitaire qu'est l'esclavage n'arrive plus jamais.
Nos parents refusent de reconnaître qu'ils ont commis des erreurs par le passé, qu'ils sont ceux qui ont laissé faire les choses comme elles sont.
Les Indiens ont été en partie exterminé en raison de leur courage, les Noirs eux, soucieux des joies de vie ont craint les armes à feu, ils ont offerts nos terres comme cadeau sans jamais penser qu'il n'y aurait peut être plus rien à offrir par la suite, ils ont laissé exploité nos forêts, notre or, nos ressources sans jamais se dire : Tiens, mais il y'a de la valeur dans tout cela, peut être devrions-nous les exploiter nous même...
Pour moi, l'homme noir n'a jamais voulu réfléchir, et il le prouve encore aujourd'hui : la grande masse ne veut pas réfléchir (particulièrement chez les francophones), elle ne veut même pas se sentir concerné par le devenir de son continent, elle se contente de l'observer de loin, de l'entendre geindre et même parfois de lui demander de fermer sa grande gueule car fatiguée de ses gémissements.
Quand je discute avec des amis, je n'en reviens pas de cette abnégation, ce refus de tenir un discours cohérent... et quand bien même ils s'y essayent, seule la colère et de la sève amère sort de leur bouche, rien à retenir, ils n'arrivent pas à se défaire de la colère.
Aucune volonté de voir devant, aucune volonté de prendre conscience.
J'ai toujours pensé et dit que c'est plus facile de fermer les yeux que de les ouvrir, car Voir peut faire mal.
Il fut un temps je prêchais, je prêchais énormément, j'arrivais même parfois à apercevoir des soupçons d'éveil, mais ceux-ci s'évaporaient bien vite.
Mais je ne laissais pas tomber pour autant, je savais que la tâche était lourde, puis au travers d'une lecture "Léonora Miano - Tel des astres éteint"...
Hélas, j'en suis arrivé au même point qu'elle : j'ai décidé de me taire, juste de me taire car que pouvais-je faire d'autre, seule... devant tout ce monde, à bien y réfléchir, pas grand chose.
Je me suis tu.
Ma ferveur ne m'a pas quitté pour autant, je sais que l'Afrique verra, elle sera... car il n'y a pas de raisons que les quatre autres continents se soient relevés et qu'elle n'y arrive pas.
Je me plais souvent à croire que le meilleur reste pour la fin, et franchement, je n'attends rien de la diaspora.
Elle est trop perdue car plutôt dépassée par les événements et elle ne sait même pas par où commencer si action il devait avoir.
Nous sommes certainement nombreux à penser enfin, à voir enfin... à discuter et à dialoguer vraiment..., mais je pense que seul ceux qui sont restés changeront les choses, ils n'auront pas besoin de nous, et ils doivent s'en convaincre car eux seuls savent ce qu'ils vivent, comment ils le vivent et comment ils arrivent malgré tout à garder le sourire à la vie.
Ils ne se suicident pas, ils se lèvent chaque jour très tôt pour affronter leur vie et tous les soirs se rassemblent autour du bol de riz en famille.
Ce sont eux qui ne doivent pas basculer dans le camp de la recherche du confort destructeur, ce sont eux qui doivent cesser de s'identifier aux occidentaux, mais plutôt ce sont eux qui doivent créer ce qu'ils veulent être.
Hé oui, pour moi, il n'y a pas de combat ici, l'occidental reste chez lui, et il a le droit de faire ce qu'il veut, il n'a pas tenu compte du fait que nous étions chez nous il y'a des années de cela, mais nous ne devons pas être comme eux : Vouloir absolument dominer par tous les moyens pour cacher une immense faiblesse face à la vie.
Parfois je me dis, alors je les laisse car ils me font parfois plus de peine, il suffit de voir comment fonctionne leur monde.
Pourquoi pleurer après les discriminations ???
Pourquoi pleurer après leurs allocations ???
Est ce ça, le combat africain ???
Est ce tout ce que nous pouvons espérer de cette terre ???
Une reconnaissance de la part de personnes qui n'ont pas su nous voir comme des hommes auparavant, simplement parce qu'à première vue les choses auraient changé ???
Moi je dis NON.
Ils font ce qu'ils veulent chez eux et sincèrement, je n'ai même pas une once de colère ou de haine.
Ils sont sur leur terre, je travaille, je paye leurs impôts, mes factures mon loyers...
Mais je ne dois pas pleurer après les remboursements des frais médicaux, ce n'est pas mon combat.
Le mien est chez moi, de l'autre coté de la mer.
Pour ma part, ce n'est que là bas que l'éveil doit se faire, le réveil de ce coté là est encore possible et nécessaire.
Tout en Afrique est à bâtir, tout est à créer et à reconstruire et c'est là un avantage non négligeable pour remédier aux stupeurs dans lesquels on veut nous enfermer, et pour cela il faut des bases solides, celles des valeurs et de loin du confort.
La jeunesse de demain, celle de demain doit entendre ce qu'il y'a à entendre et personne ne doit plus lui mentir.
C'est en elle que se trouve l'espoir..., l'instruction devant être la clé de leur succès et les rendre curieux et surtout leur donner confiance en eux...
Encore faut-il que nos politiques "vieux" se lèvent pour qu'ensemble l'on envisage l'avenir et regardons l'horizon et non contempler leur histoire.
La politique du "CONSTAT" doit être anéanti, pour celle du "PROGRES", celle des esprits... et conduire à la REFLEXION sur l'avancement MALGRE LA SITUATION ACTUELLE.
COMMENT PALLIER A TOUS CES OBSTACLES sans haine, colère ou amertume..., comment être fort face à ce qui semble être comme un destin pour les Noirs.
Voilà ce que j'en pense. |